Licenciement sans cause réelle et sérieuse
le Barème Macron entre avis contraires des Hautes instances nationale et européenne.
Article par Maître Marino-Philippe
Par une Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, a été instauré ce qui a été communément appelé le Barème Macron.
Ce barème a été codifié à l’article L 1235-3 du Code du travail dans les termes suivants :
« Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau ci-dessous ».
Autrement dit, les indemnités que le salarié pourrait percevoir en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse sont désormais plafonnées.
Acclamée par les employeurs mais critiquée par les salariés, il était important et urgent que les juridictions se prononcent sur sa validité.
Le Conseil constitutionnel a été le premier à se prononcer et dans un avis rendu dès 2018, il a considéré que le barème d’indemnisation instauré par l’ordonnance précitée était conforme à la constitution.
Pour autant, cet avis n’a pas suffi à éclaircir la situation puisque certains conseils prud’homaux ont fait de la résistance, en refusant au cas par cas, d’appliquer le barème.
C’est dans ces conditions que la Cour de cassation a été saisie pour avis et le 17 juillet 2019, et elle a considéré que le barème était compatible avec l’article 10 de la Convention n° 158 de l’organisation internationale du travail (OIT).
Toutefois, il ne s’agissait que d’un avis, de sorte que les Conseils prud’homaux continuaient d’être saisis de contestations liés au barème Macron.
La Cour a de nouveau été saisie et a cette fois-ci rendu le 11 mai 2022 deux arrêts par lesquels elle a confirmé sa position précédente : le barème est bel et bien compatible avec l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT.
Si les juridictions devaient donc adopter une position claire et uniforme, elles devaient toutefois entrer en contradiction avec certaines instances internationales.
En effet, dans une décision du 23 mars 2022 mais publiée le 26 septembre 2022, le Comité européen des droits sociaux dépendant du Conseil de l’Europe a considéré que le Barème macron constituait une violation de l’article 24 b de la Charte sociale européenne, dans la mesure où il ne permet pas une indemnité adéquate par rapport au préjudice subi.
Si les positions divergent, reste à savoir quelles conséquences cela emporte-t-il.
Car là encore, la Haute juridiction et le Comité européen ne sont pas sur la même longueur d’ondes.
Si la Cour de cassation considère que les décisions du Comité n’ont aucun effet contraignant, ce dernier estime au contraire que ses décisions doivent être respectées par les États concernés.
Leurs décisions étant en tout état de cause récentes, il y a lieu de patienter encore un peu pour avoir davantage de visibilité quant à leur application.